Au cours d’une intervention chirurgicale à l’Hôpital Cochin, Madame A a subi plusieurs lésions qui ont entraîné de multiples complications et rendu nécessaires de nouvelles hospitalisations et interventions chirurgicales.
Souhaitant obtenir réparation, la victime a saisi la juridiction administrative d’un recours indemnitaire dirigé contre l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Sa demande a cependant été rejetée par la Cour administrative d’appel de Paris qui a estimé que la lésion survenue au cours de l’intervention chirurgicale subie par la patiente ne révélait aucune faute engageant la responsabilité de l’établissement mais constituait la réalisation d’un risque inhérent à tout traitement chirurgical des affections gynécologiques.
Le Conseil d’Etat, dans l’arrêt commenté, annule l’arrêt d’appel au motif qu’eu égard aux caractéristiques du dommage résultant d’un accident non fautif ayant causé une incapacité temporaire totale excédant la durée de six mois mentionnée à l’article D. 1142-1 du code de la santé publique et dont les conséquences présentent le caractère de gravité requis par les dispositions du II de l’article L. 1142-1 du même code pour être pris en charge par la solidarité nationale, les juges d’appel auraient dû appeler l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à la cause.
Aux termes de l’alinéa 1er de l’article L. 1142-21 du code de la santé publique « lorsque la juridiction compétente, saisie d’une demande d’indemnisation des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins dans un établissement de santé, estime que les dommages subis sont indemnisables au titre du II de l’article L. 1142-1 ou au titre de l’article L. 1142-1-1, l’office est appelé en la cause s’il ne l’avait pas été initialement. Il devient défendeur en la procédure ».
La Haute juridiction considère qu’il résulte de ces dispositions « que la juridiction du fond saisie de conclusions tendant à l’engagement de la responsabilité d’une personne mentionnée au I de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique est tenue, si elle estime que le dommage invoqué remplit les conditions pour être indemnisé en tout ou partie sur le fondement du II du même article ou de son article L. 1142-1-1, d’appeler l’ONIAM en la cause, au besoin d’office, puis de mettre à sa charge la réparation qui lui incombe même en l’absence de conclusions dirigées contre lui, sans préjudice de l’éventuelle condamnation de la personne initialement poursuivie à réparer la part du dommage dont elle serait responsable ».
Ainsi, saisie d’une demande tendant à l’engagement de la responsabilité d’un professionnel de santé ou d’un établissement, service ou organisme dans lequel sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins, la juridiction qui estime que le dommage peut, en tout ou partie, être indemnisé au titre de la solidarité nationale parce qu’il remplit les conditions de l’article L. 1142-1 II du code de la santé publique, est tenue d’appeler l’ONIAM à la cause, même d’office.
Il s’agit là d’une décision importante dans la mesure où le Conseil d’Etat fait de l’appel à la cause de l’ONIAM par les juges du fond, lorsqu’ils estiment que le dommage peut être réparé au titre de la solidarité nationale, une obligation d’ordre public qu’ils sont tenus de mettre en œuvre d’office si le requérant ne l’a pas lui-même demandé, tout comme ils sont tenus de mettre à la charge de l’office la réparation qui lui incombe même en l’absence de conclusions en ce sens.
CE, 30 mars 2011, ONIAM c/ Mme A, req n° 320581