La question posée à la CJUE, dans cette affaire, concernait la qualité d’organisme de droit public, et donc de pouvoir adjudicateur, d’une filiale de la société des chemins de fer lituanienne (VLRD) ayant pour activité, notamment, la fabrication et la maintenance de locomotives et d’autres engins ferroviaires.
Trois critères cumulatifs doivent être satisfaits pour cette qualification soit retenue :
- L’organisme doit avoir été créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial ;
- Il doit être doté de la personnalité juridique ;
- Soit son activité est financée majoritairement par une personne ou un organisme de droit public, soit sa gestion est soumise à un contrôle de ces derniers, soit son organe d’administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par ces mêmes personnes.
Au cas présent, seul le premier de ces critères posait difficulté : celui de l’activité de cette filiale, celle-ci ayant indéniablement la personnalité juridique et étant une filiale à 100 % de la société des chemins de fer lituanienne et contrôlée par elle.
Pour apprécier la satisfaction de ce premier critère, la Cour retient que cette filiale, sous réserve d’une vérification du juge de renvoi, a été « créée dans le but spécifique de satisfaire à des besoins de sa société mère dès lors que les besoins que VLRD a été chargée de satisfaire constituent une condition nécessaire à l’exercice des activités d’intérêt général de cette société mère ».
A l’inverse, elle considère qu’il n’est pas pertinent de prendre en compte le fait que cette filiale exerce d’autres activités sur le marché concurrentiel.
Cette filiale avait donc bien été créé, a priori, pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général.
Quant à savoir si ces besoins d’intérêt général avait un caractère autre qu’industriel ou commercial, la Cour donne une grille d’appréciation à la juridiction de renvoi pour qu’elle se prononce, tenant notamment :
- Aux circonstances ayant présidé à la création de l’organisme concerné ;
- Aux conditions dans lesquelles il exerce les activités visant à satisfaire des besoins d’intérêt général, y compris, notamment, l’absence de concurrence sur le marché ;
- A l’absence de poursuite d’un but lucratif ;
- A l’absence de prise en charge des risques liés à ces activités ;
- Au financement public éventuel des activités en cause.
Ainsi, le fait d’opérer dans des conditions normales du marché, de poursuivre un but lucratif et de supporter les pertes liées à l’exercice desdites activités, ne vont pas dans le sens d’un caractère autre qu’industriel ou commercial.
La Cour invite donc la juridiction de renvoi à rechercher si « au moment de l’attribution du marché en cause au principal, les activités exercées par VLRD, visant à la satisfaction des besoins d’intérêt général, étaient effectuées en situation de concurrence, et notamment si VLRD pouvait, eu égard aux circonstances de l’espèce, se laisser guider par des considérations autres qu’économiques ».
En revanche, nous dit la Cour, l’existence d’une concurrence développée ne permet pas, en elle-même, d’exclure ce caractère qu’industriel et commercial des besoins.