L’article 88 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale a été modifié par la loi n°2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires pour prendre en compte le remplacement de la prime de fonctions et de résultats (PFR) par le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP).
Désormais, la dernière phrase du 1er alinéa de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 précitée dispose que : « Lorsque les services de l’Etat servant de référence bénéficient d’une indemnité servie en deux parts, l’organe délibérant détermine les plafonds applicables à chacune de ces parts et en fixe les critères, sans que la somme des deux parts dépasse le plafond global des primes octroyées aux agents de l’Etat ».
L’application de ce nouveau régime indemnitaire a cependant fait l’objet d’une importante querelle d’interprétation entre les collectivités territoriales et l’Etat : jusqu’où doit aller le principe de parité entre les fonctions publiques territoriale et de l’Etat au regard du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales ?
Le Conseil Constitutionnel, saisi le 22 mai dernier par le Conseil d’Etat dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, vient de se prononcer sur cette dernière question dans sa décision n°2018-727 QPC du 13 juillet 2018.
Pour y répondre, le Conseil a procédé à un raisonnement en deux temps.
Il a tout d’abord rappelé les limites posées au législateur lorsqu’il entend fixer aux collectivités territoriales des obligations et des charges. Ces dernières doivent ainsi répondre à des exigences constitutionnelles ou concourir à des fins d’intérêt général, ne pas méconnaître la compétence propre des collectivités concernées, ne pas entraver leur libre administration et être définies de façon suffisamment précise quant à leur objet et à leur portée.
Le Conseil s’est également référé au principe de parité entre la fonction publique d’Etat et la fonction publique territoriale en matière de régime indemnitaire, issue du premier alinéa de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984, et consacré par une jurisprudence constante du Conseil d’Etat.
Or, pour le Conseil constitutionnel, il ne fait aucun doute que le législateur, en mettant en place pour le RIFSEEP une « certaine parité » entres les deux fonctions publiques, a poursuivi un objectif d’intérêt général visant à « contribuer à l’harmonisation des conditions de rémunération au sein des fonctions publiques étatique et territoriale et faciliter les mobilités en leur sein ou entre elles deux ».
De surcroit, le Conseil a souligné que les collectivités, dans ce nouveau dispositif, bénéficient de la liberté de fixer les plafonds applicables à chacune des parts, sous la seule réserve que leur somme ne dépasse pas le plafond global des primes octroyées aux agents de l’État, et de la liberté de déterminer les critères d’attribution des primes correspondant à chacune de ces parts.
Par conséquent, le Conseil constitutionnel a conclu que « les dispositions contestées, qui ne sont pas entachées d’incompétence négative, ne méconnaissent pas le principe de libre administration des collectivités territoriales. La dernière phrase du premier alinéa de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclarée conforme à la Constitution ».
Ainsi, le débat qui s’éternisait entre l’Etat et les collectivités territoriales sur la composition du RIFSEEP semble clos.
Pour autant, il laisse subsister une disparité entre les collectivités territoriales :
- D’un côté celles qui ont mis en place le RIFSEEP avec la seule part IFSE et qui n’ont jusqu’à présent fait l’objet d’aucune observation de l’Etat ;
- De l’autre, les collectivités qui ont été sommées de mettre en place un RIFSEEP à deux parts, IFSE et CIA.
Nul doute que des réglages vont avoir lieu.