L’adaptation des règles régissant le télétravail dans les trois fonctions publiques est prévue par la loi n°2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique qui pose la possibilité du recours ponctuel au télétravail (article 49). Mais cette timide ouverture, bien insuffisante pour insuffler dans le secteur public la pratique du télétravail que connait le secteur privé, a été rattrapée par la crise sanitaire liée au Covid-19 qui a conduit les administrations et les collectivités à autoriser en urgence certains de leurs agents à télétravailler.
Avec la publication du décret n°2020-524 du 5 mai 2020 modifiant le décret n° 2016-151 du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature, le droit rattrape la pratique.
Ce nouveau texte étend les lieux éligibles au télétravail : le domicile de l’agent, un autre lieu privé ou tout lieu à usage professionnel (tel que les lieux de coworking), qui peuvent tous être prévus dans le cadre d’une seule autorisation. Néanmoins, l’employeur n’est pas soumis à l’obligation de paiement des frais de location d’autre lieu à usage professionnel.
Le rythme du télétravail est largement assoupli : il peut être soit régulier soit ponctuel.
Par ailleurs, les jours de télétravail accordés peuvent être fixes, sur la semaine ou sur le mois. L’agent peut aussi se voir attribuer un volume de jours flottants de télétravail par semaine, par mois ou par an. Ces différentes possibilités ne sont pas exclusives l’une de l’autre, puisqu’un agent dans le cadre d’une même autorisation peut bénéficier de plusieurs de ces modalités.
La limite autorisée de trois jours de télétravail par semaine connait désormais des dérogations, selon certaines conditions : pour des raisons tenant à l’aptitude physique (état de santé, handicap ou grossesse) ou dans le cas d’une situation exceptionnelle perturbant l’accès au service ou le travail sur site.
En ce qui concerne la demande de télétravail, elle répond aujourd’hui à un régime juridique précis :
- lorsqu’elle porte sur le lieu du domicile de l’agent ou de tout un autre lieu privé, elle doit être assortie d’une attestation de conformité aux spécifications techniques ;
- il appartient au chef de service, à l’autorité territoriale ou à l’autorité investie du pouvoir de nomination, selon les cas, d’apprécier la compatibilité de la demande avec la nature des activités exercées et l’intérêt du service ; le décret précise également l’autorité compétente pour apprécier la compatibilité de la demande lorsque l’agent est un cadre hospitalier relevant du centre national de gestion ;
- toute demande appelle une réponse écrite dans un délai d’un mois (ce qui laisserait supposer qu’une absence de réponse écrite dans ce délai soit assimilée à un refus, mais cela n’est pas expressément précisé) ;
- l’autorisation peut prévoir une période d’adaptation de trois mois maximum ;
- il peut être mis fin de manière anticipée à l’autorisation, par l’administration ou par l’agent dans des conditions définies ;
- tout refus doit enfin être motivé.
Le droit de l’agent est renforcé en ce qui concerne sa faculté de saisir la CAP ou la CCP de tout refus qui lui serait opposé, dans le domaine du télétravail, par l’administration.
Par Anne-Mathilde Potterie, avocate du pôle Fonctions publiques, Claisse & Associés.